Pollution des avions, de quoi on parle
Schéma in Les émissions polluantes des aéronefs – 2015 – page 12 – STAC / Service Technique de l’Aviation Civile
Il faut distinguer les émissions ayant un effet sur le changement climatique (CO2, H2O, N2, …) même si elles semblent inoffensives, comme l’eau, il s’agit des trainées de vapeur dans le ciel qui ajoutent à l’effet de serre. Ces émissions intéressent les riverains en leur qualité de citoyens habitant une planète dont la durée de vie s’amenuise, mais pas en leur qualité de riverains d’aéroport.
En revanche, les riverains d’aéroport sont directement concernés par les émissions polluantes locales qui ont un effet direct sur leur santé, principalement :
- les particules ultra-fines (inférieures à 2,5µ, certaines même inférieurs à 1µ) ce sont celles qui vont tout au fond des bronches dans les alvéoles et pénètrent dans les cellules (les particules plus grosses – entre 2 ,5µ et 10µ – sont nocives pour l’appareil respiratoire mais ne pénètrent pas dans les cellules). En général, seules les particules fines (inférieures à 10µ) sont mesurées, sans distinction de taille parmi les plus petites, or ce sont les particules ultra-fines (inférieures à 2,5µ qui sont les plus nocives et ce sont celles émises par les avions, mais souvent elles ne sont pas mesurées)
- les oxydes d’azote (NOx)
- le dioxyde de soufre (SOx)
- les composés organiques volatiles COV
- le monoxyde de carbone CO
Nous aimons une formule : kérosène=gazole donc avion=diesel, or les avions ne sont jamais concernés par les mesures concernant les réductions de pollution visant le diesel.
En réalité, le Jet fuel (carburant couramment appelé kérosène par extension et utilisé par les avions des compagnies aériennes) est même pire que le diesel car il contient des additifs extrêmement dangereux dont les effets nocifs ne sont pas tous encore connus.
Pollution des avions, quel territoire
Classiquement, les mesures sont faites sur les plateformes aéroportuaires et ne tiennent compte que de la pollution au sol de l’aéroport. Cela inclut donc les véhicules – voitures et camions – amenant des passagers ou du fret à l’aéroport (dans l’enceinte de l’aéroport mais pas sur les routes d’accès), les véhicules travaillant à l’aéroport (transport de bagages, camions citernes, bus passagers pour l’accès aux avions, et le roulage des avions sur les taxiways[1]. A Charles de Gaulle par exemple, un avion peut rouler plus de 20 minutes pour atteindre la piste et bruler plus d’une tonne de kérosène ! Les polluants de la plateforme aéroportuaire peuvent être mesurés jusqu’à 6 km de l’aéroport[2].
Ne sont pas mesurées : les émissions des véhicules accédant à l’aéroport sur les routes d’accès jusqu’à l’aéroport ou après leur sortie de l’aéroport, ni les avions en vol à l’approche de l’aéroport ou au décollage.
Les avions en l’air émettent des polluants mais ils ne sont pas mesurés ! l’OACI a défini un cycle LTO (landing and take off) – atterrissage et décollage- pour définir le volume dans lequel évoluent les avions et dans lequel ils émettent une pollution ayant une incidence au sol. Il est convenu que la pollution des avions est ressentie localement lorsqu’ils sont à une altitude inférieure à 3.000 pieds soit 915 mètres du sol. Et, contrairement à ce que certains pensent, il ne s’agit pas de mesurer une pollution dans le ciel à 900 mètres d’altitude mais la pollution tombée au sol à hauteur d’homme !
La pollution des avions s’ajoute à la pollution ambiante et vient augmenter l’incidence sur les riverains;
Schéma in Les émissions polluantes des aéronefs – 2015 – page 11 – STAC / Service Technique de l’Aviation Civile
On s’aperçoit alors que le territoire concerné par la pollution des avions, et donc les communes concernées, est d’environ 18km à l’approche et 9 km au décollage. Sans compter l’effet des vents qui peut étendre encore la population polluée.
La pollution des avions, pour combien de temps encore ?
Aujourd’hui, tout est fait pour réduire la pollution au sol, notamment grâce aux filtres catalytiques et filtres à particules. Les voitures, les camions mais aussi l’industrie. Les efforts considérables contre la pollution résultant des transports terrestres porteront leurs fruits dans un avenir assez proche. En revanche, aucune solution n’est aujourd’hui économiquement viable pour réduire les émissions polluantes des avions. Ils ont une combustion externe et les réacteurs ne peuvent pas être équipés de filtres !
Le rapport environnemental européen sur l’aviation[3] prévoit une augmentation des oxydes d’azote de 43% entre 2014 et 2035 !
L’industrie de l’aviation parle d’agro-carburants[4]. Il n’est pas envisageable d’en ajouter, à terme, plus de 20% au kérosène, je crois que le maximum mélangé à ce jour est de 10%.
L’autre argument est la réduction de la consommation grâce aux moteurs moins gourmands en carburant. Le souci est que les prévisions prévoient un doublement du trafic aérien mondial entre 2012 et 2035[5]! en réalité, les avions continueront longtemps de polluer ; sans compter que la durée de vie d’un avion est de plusieurs dizaines d’années et que les vieux avions bien polluants continueront de voler encore longtemps.
Plus les autres moyens de transports seront équipés de filtres, plus la contribution de l’aérien à la pollution augmentera et dans quelques années, la contribution de l’aérien représentera la plus grande partie de la pollution des transports.
[1] Routes de liaison entre les pistes et les terminaux
[2] Etude sur les particules de Schiphol – Amsterdam
[3] http://ec.europa.eu/transport/sites/transport/files/modes/air/aviation-strategy/documents/european-aviation-environmental-report-2016-72dpi.pdf
[4] S’il vous plait ne parlez pas de « bio-carburant », ils n’ont rien de bio !! Ils consomment une quantité incroyable de terres, forêts rasées et terres agricoles détournées de leurs fonctions nourricières
[5] Challenge of growth – 2013 – Eurocontrol – http://www.eurocontrol.int/sites/default/files/content/documents/official-documents/reports/201307-challenges-of-growth-summary-report.pdf